C’était à la mi-2020, la première (que l’on espérait être la dernière) vague de la pandémie de Covid-19 refluait. La firme Fremantle, multinationale productrice de programmes, a approché Michael Winterbottom pour lui proposer de concevoir et de diriger une minisérie relatant la tempête que le Royaume-Uni venait de traverser.
Joint en visioconférence à Londres, le cinéaste (Welcome to Sarajevo, en 1997, In this World, en 2002, The Trip, en 2010…) explique pourquoi il a répondu à l’appel : « On disait, à ce moment, que nous venions de vivre chacun dans notre bulle – une expérience comparable à la survie pendant une guerre –, que ça avait été une expérience unique pour nos générations. Ce sont des clichés, mais il y a une part de vérité. En Grande-Bretagne, beaucoup de gens passent énormément de temps à reconstituer la seconde guerre mondiale. Mais c’était il y a soixante-dix ans et quelle est l’utilité de servir la millième version de cette histoire ? Là, on m’offrait l’occasion de m’engager dans le récit d’une expérience qui restera, tout de suite après. »
This England devait s’appeler This Sceptered Isle (« cette île porteuse de sceptre »), deux expressions empruntées à William Shakespeare qui, dans Richard II, les met dans la bouche de Jean de Gand, au long d’une tirade fameuse qui célèbre la singularité britannique tout en en déplorant la corruption. Il se trouve que le protagoniste de la série, Boris Johnson, aime à citer le barde (et les classiques, latins et grecs, dans le texte).
Michael Winterbottom et son équipe se sont engagés dans un énorme travail de documentation pour évoquer la vie pendant les trois premiers mois de la pandémie. « Nous avons parlé aux gens de Downing Street, raconte le scénariste et réalisateur, aux fonctionnaires du ministère de la santé, aux scientifiques des comités, aux chercheurs qui travaillaient sur le vaccin. »
De ce matériau émerge un récit dont son auteur veut qu’on l’appelle « chronique », et auquel il refuse la qualification de fiction. De fait, This England tient parfois du reenactment, processus artistique ou thérapeutique par lequel les acteurs d’une situation réelle la rejouent. C’est le cas de certaines séquences tournées dans les « care homes », équivalents britanniques des Ehpad, où soignants et pensionnaires ont retrouvé, devant la caméra, les gestes de la pandémie.
Multiplication des personnages
Michael Winterbottom concède que son projet emprunte à la fiction la capacité de passer instantanément d’un monde à l’autre, de faire cohabiter des vies qui ne se sont jamais rencontrées. L’une des singularités de la série tient à la multiplication des personnages, des figures plutôt, puisque chacun et chacune – à l’exception du premier ministre et de son entourage – ne fait qu’apparaître brièvement à l’écran, souvent au moment de sa mort. « C’est une façon de raconter la rapidité de la propagation du virus, explique Michael Winterbottom, mais aussi la rapidité des stratégies développées face à lui. Ces différentes vitesses de réaction ont construit l’histoire. C’est un élément rythmique qui m’a fait penser qu’il vaudrait mieux avoir beaucoup de personnages, de perspectives – des scientifiques, des médecins, des infirmières, des patients –, plutôt que se concentrer sur un docteur ou un malade dont on se demande ce qu’il va advenir. »
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