Le 5 juillet 2018, Claude Lanzmann mourait à Paris, à l’âge de 98 ans. L’auteur de Shoah (1985) et de quelques autres fulgurants chefs-d’œuvre tirés des rushs de ce monumental essai avait toutefois tourné, peu avant sa mort, un film étrange, encore que caressé lui aussi par l’aile de la « folie » lanzmannienne, intitulé Napalm (2017). Soit la mise sur pellicule d’un souvenir intime, déjà évoqué dans son autobiographie, Le Lièvre de Patagonie (Gallimard, 2009). Il s’agit d’une brève mais inaltérable passion amoureuse, vécue en 1958 avec une jeune femme de Pyongyang, capitale de la Corée du Nord, alors que le cinéaste y effectuait la première visite occidentale parmi une délégation d’intellectuels français engagés aux côtés du communisme.
Fallait-il que cette passion fût forte pour que, presque soixante ans après son embrasement, Lanzmann y consacrât l’entièreté de son film, sans trouver bon de revenir un tant soit peu sur les raisons de ce voyage, sur l’enthousiasme qui s’y exprimait pour l’une des pires dictatures du monde, ni même sur le commerce qu’il y entretînt avec ses compagnons de voyage, parmi lesquels rien de moins que Chris Marker ou Armand Gatti. Rien.
En revanche, à la vue et au contact de l’infirmière Kim Kun-sun naquit un désir irrépressible de fausser compagnie aussi bien à la délégation qu’aux officiels qui l’encadraient fermement pour lui faire enchaîner les inaugurations de chrysanthèmes. Ce qui fut fait en bonne et due forme, aux risques et périls des amants d’un jour, ainsi que le raconte en personne, avec une émotion stupéfiante, le sujet du coup de foudre retourné sur place à 90 ans.
Le jeu de la vérité
Film en un mot formidable, mais passablement bancal aussi, le récit de la passion amoureuse étant pour l’essentiel enregistré dans un bureau à Paris, de sorte que le retour de Lanzmann en Corée du Nord, où ses analyses politiques de ce pays suscitent le scepticisme, y est moins performant qu’il ne devrait. Or, François Margolin, qui fut le producteur de Napalm, revient aujourd’hui sur ce séjour, où il l’accompagna et dont il produit des vues inédites. Il nous éclaire ainsi, accessoirement, sur les raisons des difficultés d’alors, avec les mille et un empêchements de filmer suscités par la surveillance officielle de l’équipe et un Lanzmann plus goguenard qu’il n’y paraît. Il nous offre, plus essentiellement, l’ultime portrait du grand homme encore vivant.
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